Assurance emprunteur : les banques sont-elles au-dessus des lois ?

Rapport CCSF assurance emprunteur

Face aux pratiques bancaires - régulièrement dénoncées par les acteurs du marché - qui empêchent les consommateurs de changer leur assurance de prêt, le gouvernement a demandé un rapport au Comité Consultatif du Secteur Financier (CCSF). Ce rapport vient d’être publié et se montre résolument optimiste, sans doute un peu trop… Manque de neutralité, interprétations hasardeuses, manipulation des chiffres... Découvrez ce que cache le rapport du CCSF. 

Une ouverture à la concurrence exagérée par le rapport

Le rapport du CCSF considère que « la part des contrats alternatifs […] ne cesse de progresser. »1 et l’établit à « 25 % des contrats » d’assurance emprunteur. Mais pour obtenir ce chiffre de 25 %, le cabinet Actélior, en charge de cette étude, n’a pas hésité à inclure les contrats bancaires dits « défensifs » dans les contrats alternatifs !

Inclure ces contrats bancaires est pour le moins discutable car cela ne reflète pas la réalité du marché et la fragilité de la concurrence… Si on enlève la part des contrats bancaires qui pèsent 13,1 % de la production de nouveaux contrats, on obtient un taux réel de 12,4 % de contrats alternatifs, ce qui n’a pas évolué depuis plus de 10 ans. Et si les assureurs alternatifs externes venaient à sortir du marché, ces contrats « défensifs » ou « alternatifs internes » tels que les nomme le rapport, disparaitraient aussitôt, les banques n’ayant plus aucun intérêt à les conserver. On ne peut donc pas parler décemment d’un « marché où la concurrence est en marche » !

Une baisse des prix oui, mais laquelle ?

Le rapport du CCSF établi que « les tarifs des contrats emprunteur, contrats groupes bancaires ou contrats alternatifs, ont considérablement baissé, au bénéfice de la majorité des emprunteurs, avec des baisses allant de 10 % à 40 %, tout en conservant une excellente couverture des garanties, voire en les renforçant »2.

La presse a d’ailleurs largement relayé cette bonne nouvelle. Pourtant, lorsque l’on regarde plus précisément le rapport du CCSF (page 24), il est bien précisé que « cette analyse porte uniquement sur des contrats alternatifs externes, les informations transmises concernant les contrats alternatifs bancaires n’étant pas suffisamment représentatives, elles n’ont pas été reprises dans cette partie de l’étude. » !

Comment peut-on attribuer une baisse générale des tarifs d’assurance emprunteur en se basant uniquement sur les 12 % de part de marché des contrats alternatifs externes ?

Le CCSF a la réponse : « les représentants du secteur bancaire ont précisé que, ces contrats (i.e. : leurs contrats « défensifs ») se positionnant en concurrence directe avec les contrats alternatifs externes, leur niveau de prix et leurs évolutions sont comparables au regard du choix des consommateurs se portant sur les uns ou sur les autres. ».

Cette analyse est plus que légère, surtout si l’on regarde la suite du rapport (page 26) qui montre que les contrats bancaires n’ont pas tous suivi cette tendance et que leurs baisses de tarifs ont profité aux plus jeunes, tandis que les emprunteurs plus âgés (au-delà de 55 ans) « ont vu leur tarif augmenter jusqu’à +33 %. ». 

Des difficultés mésestimées

Le rapport du CCSF note « des difficultés opérationnelles » dénoncées spontanément par les assureurs et intermédiaires en assurance ayant contribué à l’étude (page 39)3, tout en précisant qu’il s’agit de « verbatims qualitatifs et non documentés en termes de statistiques mais récurrents » contestés par les banques qui « indiquent que les difficultés relevées sont aujourd’hui résiduelles ».   

Si 60% des acteurs alternatifs ont spontanément ajouté à leurs réponses des éléments sur les difficultés rencontrées (réponses tardives ou non-réponse, pratiques dilatoires, quotas pour les courtiers…), c’est bien parce que le questionnaire qui était censé « identifier les éventuels blocages persistants sur le marché » ne prévoyait aucune question sur ce sujet.

Les mauvaises pratiques des banques sont à l’origine de cette étude commanditée par le gouvernement pour comprendre les difficultés rencontrées sur le marché de l’assurance emprunteur. Alors, pourquoi le CCSF n’a-t-il pas tenté de répondre à ces questions ?

Le CCSF soulève tout de même des difficultés dans le processus de souscription mais les justifie aussitôt par des difficultés de gestion liés à des délais « très contraints » et à la technicité du produit. Quant à l’absence d’information, qui est le problème qui revient le plus souvent, les banques estiment que c’est à l’emprunteur « d’assurer le bon dialogue avec ses interlocuteurs ». Mais ce défaut d’information peut nuire à l’emprunteur qui risque de se faire prélever en double…

Le comité ose même parler « d’accords entre la banque et les courtiers limitant les possibilités de recours à la délégation » alors qu’il s’agit de quotas subits par les courtiers et de pression des banques, ces dernières allant même jusqu’à menacer les courtiers de suspendre leur collaboration ! Qui plus est, ces quotas sont par nature contraire à la loi qui offre à l’emprunteur le droit de choisir son assurance de prêt. Il n’est pas normal pour un organisme d’Etat tel que le CCSF de minimiser à ce point des pratiques contraires au droit des emprunteurs !


En manipulant ainsi les données, le CCSF conclu que « la concurrence est en marche » et que « la part des contrats alternatifs ne cesse de progresser » mais la réalité est toute autre. L’assurance emprunteur est un marché où la concurrence est rude et n’a pas évolué depuis 10 ans, malgré une législation en faveur du libre choix. L’arrivée des acteurs alternatifs a permis de faire baisser les tarifs, tout en améliorant le niveau de garanties des contrats, mais les banques tentent par tous moyens de conserver l’assurance emprunteur : contrats « défensifs », baisses de prix discrétionnaires, manœuvres dilatoires, non-réponses… Bien souvent les banques ne respectent pas la législation en vigueur et ne sont pour autant jamais inquiétées.

Ce sont les emprunteurs qui restent les premiers pénalisés par la complexité du changement d’assurance de prêt. Il leur est quasiment impossible de parvenir à changer leur assurance de prêt seuls. C’est pourquoi SwitchAssur propose un mandat de mobilité qui lui permet de prendre en charge pour le compte de ses clients l’ensemble des opérations de changement d’assurance avec les banques.

Aujourd’hui, SwitchAssur, le comparateur expert du changement d’assurance emprunteur parvient à des taux d’acceptation inégalés de 85 % (2% de refus seulement mais 13% des banques jouent la carte de la non-réponse)4.  


 

1. Source : communiqué de presse du CCSF – le rapport indiquant précisément page 17/18 « la part de contrats alternatifs dans les ventes d’assurance emprunteur, qu’ils soient proposés par des banques (contrats alternatifs internes) ou par des assureurs externes ou courtiers (contrats alternatifs externes) progresse régulièrement sur la période 2017-2020, pour atteindre 25,5 % de la production annuelle.

2. Source : Rapport du CCSF page 24 « Une baisse des prix qui touche l’ensemble des profils sur le marché de la délégation /substitution La baisse des prix observée depuis 2010 sur le marché de la délégation et de la substitution d’assurance concerne l’ensemble des profils assurés : tranches d’âge, sélection fumeur/non-fumeur (représentés graphique 10), ou encore catégorie socio-professionnelle :

une baisse tarifaire mesurée entre 20 % et 41 % dont bénéficient tous les assurés ;

• une baisse tarifaire moyenne de 29 % sur les garanties DC/PTIA + ITT-IPT ;

• une baisse tarifaire moyenne de 33 % sur les garanties DC/PTIA seules.

Notons que cette analyse porte uniquement sur des contrats alternatifs externes, les informations transmises concernant les contrats alternatifs bancaires n’étant pas suffisamment représentatives, elles n’ont pas été reprises dans cette partie de l’étude.Néanmoins, les représentants du secteur bancaire ont précisé que, ces contrats se positionnant en concurrence directe avec les contrats alternatifs externes, leur niveau de prix et leurs évolutions sont comparables au regard du choix des consommateurs se portant sur les uns ou sur les autres. »

3. Source : Rapport du CCSF page 39 « Ces verbatims qualitatifs et non documentés en termes statistiques mais récurrents, mettent en avant des difficultés ressenties par les assureurs, les agents généraux d’assurances mandataires de ces derniers et les courtiers dans le processus global de souscription, et qui sont de nature à freiner leurs gains en termes de parts de marché, notamment au regard des coûts d’investissements nécessaires pour les gagner. […] Les acteurs bancaires, pour leur part, au regard des réponses apportées au questionnaire, mettent en avant le caractère subjectif des réactions par nature extrêmes, qui ne s’appuient pas sur des éléments objectifs et mesurables et indiquent que les difficultés relevées sont aujourd’hui résiduelles. »

4. Source : étude Securimut Juillet 2020 page 38 et détail par banque page 39

LES ACTUS DE L'ASSURANCE EMPRUNTEUR

La plupart des contrats d'assurance emprunteur contiennent des délais de carence et de franchise. Dans les deux cas, ces délais concernent une période pendant laquelle vous n'êtes pas couverts. Il est important d'analyser attentivement ces deux éléments de votre contrat pour bénéficier de la meilleure couverture possible.

Changer son assurance de prêt te permet de faire des économies. Mais certains autres éléments sont à surveiller pour bénéficier d’une bonne prise en charge : privilégier un contrat forfaitaire, observer le délai de franchise, la prise en charge selon ta profession au jour du sinistre, le coût sur 8 ans et les exclusions.

Les tarifs des assurances générales ont connu une hausse entre 2023 et 2024, principalement due à l'inflation. En revanche, l'assurance emprunteur propose généralement une stabilité des tarifs et des garanties. Si ce n'est pas le cas, tu as la possibilité de changer d'assurance de prêt pour opter pour un contrat irrévocable.